lundi 11 décembre 2017

Mes étoiles 1980

Mes étoiles 1980

Olivier Kaefer


Il est de ces livres qui se lisent comme boit un petit verre d'alcool, à la fin d'un bon repas entre amis, cul-sec. C'est le cas de l'autobiographie d'Olivier Kaefer. On prend cet ouvrage et on ne le repose qu'une fois terminé.



Le bandeau qui ceint le livre nous affirme "Les coulisses de la tournée phénomène", laissant présager que bien des secrets allaient être dévoilés. Il n'en est rien. D'ailleurs, la part réservée au grand spectacle qui rassemble depuis dix ans les vedettes de la chanson des années 80, ne représente qu'une petite centaine de pages, sur 275.

Au-delà de la génèse de la RFM Party 80 et des anecdotes qu'une entreprise comme celle-ci peut faire naitre, ce qui m'a le plus intéressé, c'est le parcours professionnel, original et déterminé de l'auteur. En effet, Olivier Kaefer a le virus du spectacle dans son ADN. Dès son plus jeune âge, il ne vit que pour les shows télévisés des Carpentier et très vite au début des années 80 entrera dans une des premières radios libres de Blois, sa ville natale. Là, il donnera libre court à sa passion, la musique.

Se sentant à l'étroit dans sa province, il ne voit qu'un seul moyen de s'en sortir, "monter" à la capitale. Des entretiens qui ne donnent rien et des promesses non tenues, le renvoient à la case départ. Puis, un jour, une place est à prendre sur la radio du RPR (sic), qu'importe le patron Olivier fonce et occupe la matinale. Grâce à sa fonction, il est amené à sortir dans les endroits les plus à la mode de la capitale et passe une grande partie de ses nuits au Palace. Il y croise des vedettes de l'époque et des artistes en devenir. Son carnet d'adresses s'enrichit rapidement.

Lova Moor, Eric Moréna, Les Boys band, Il se fait les dents avec ces artistes, découvre le monde des tournées, de la nuit et s'épanouit dans ce milieu. Puis, il y a "la" rencontre avec Patrick Juvet qui en cette décennie 90 semble naviguer à vue. C'est Amanda Lear qui met le chanteur helvétique sur la route de l'agent. Puis il y aura une collaboration avec Plastic Bertrand et enfin Lio "La femme de ma vie " (dixit).

Fort de ces rencontres, au beau milieu des années 2000, nait le projet fou de réunir sur la même affiche, une dizaine d'artistes des années 80. Olivier Kaefer et son associé Hugues Gentelet appellent toutes leurs connaissances et parviennent à monter un beau plateau avec : Jean-Pierre Mader, Rose Laurens, Lio, François Feldman, Jean Schulteis, Désirless, Cookie Dingler... On connait la suite.

S'ensuivront des années de succès public et des galères financières en coulisse. Chausse-trappe, coups fourrés, manipulation, ingratitude, Olivier Kaefer dit tout de ce qu'il a vécu au cours des dix dernières années. Tantôt amusant, tantôt dur, ce milieu du show business n'est pas un long fleuve tranquille. 

Aujourd'hui, il le jure, il a tourné la page des 80' et regarde résolument  vers l'avenir en produisant à la fois, un jeune groupe d'adolescents les New Poppys, le chanteur Amaury Vassili et tente l'aventure théâtrale, à la comédie Caumartin, en montant "bouquet final".

Il est certain que la vie d'Olivier Kaefer pourrait donner lieu à la rédaction d'une suite à ce premier ouvrage. Et pourquoi pas "Mes étoiles 2000" ?

Olivier Vadrot

"Mes étoiles 1980" Olivier Kaefer
 Editions Pygmalion (275 pages)























lundi 13 novembre 2017

Damien Saez à corps et à cris

Damien Saez à corps et à cris



   Je dois bien l'avouer, je suis passé totalement à travers l'information de la sortie d'une biographie consacrée à Damien Saez, il y a déjà deux ans. Les voies du web n'étant pas impénétrables, j'ai découvert l'existence de ce livre, au hasard de mes lectures numériques. Je me suis donc empressé de le commander.



   Autant le dire de suite, j'aime Damien Saez depuis son premier album "Jours étranges", paru en 1999 et ne manque jamais la parution d'un nouvel opus. Cet artiste est un mystère. Peu de prises de paroles publiques. Pas d'interviews dans les médias. Promotion minimale. Et pourtant des disques qui se vendent plutôt bien, dans un marché atone, mais aussi et surtout de grandes salles de concerts qui affichent "complet" à chaque tournée. Quelle est la clé d'une telle réussite ? 

   Je reçois donc la biographie de Saez, écrite par Romain Lejeune. Ce livre court, environ 150 pages, explique de manière concise, claire et précise, quel est le parcours de l'artiste, de sa naissance à Sisteron, en passant par Paris, Dijon ou Châtillon sur Seine. Des blessures de l'enfance, à la recomposition du foyer avec un beau-père aimant, des espoirs suscités par ses prix d'interprétation au piano, ses premiers textes, ses premières mélodies enregistrées sur une cassette, des rencontres décisives avec la manageuse de Zazie ou le coup de pouce de William Sheller, tout est dans le livre. 

   L'auteur a fait un vrai travail de journaliste en rencontrant l'artiste et les personnes proches de lui. De ces discussions nait un portrait sans concession. On apprend ce que l'on pressentait, Saez est un artiste solitaire qui donne tout pour la musique, l'écriture et le studio. Enragé de poésie et de composition, il ne sait faire que ça. Exigeant et compliqué dans ses rapports à autrui, son entourage personnel et professionnel est parfois soumis à des tempêtes émotionnelles qui laissent des traces.  Mais ça, c'est l'artiste...

   En ce qui concerne l'homme, la médaille a bien sûr un revers. Au moment de la sortie de son premier disque, Damien ne rechignait pas à passer quelques jours de vacances chez Pascal Nègre, à Saint-Tropez; il vit actuellement dans Paris du côté de Saint-Michel (alors qu'on l'aurait volontiers imaginé à Belleville ou République); que le bar de l'hôtel Costes (lieu branché et inaccessible par "les populaires") le reçoit très souvent et qu'il se gave de séries américaines. 

  Quoi qu'il en soit, le livre de Romain Lejeune nous présente un artiste sincère et pétri de contradictions, mais n'est-ce pas après tout, le propre de l'Homme ? Arthur Rimbaud détestait la guerre et pourtant il finira par vendre des armes. Est-ce que cela entache son génie littéraire ? Non, bien sûr. Alors on pardonnera à Damien Saez ses excès, ses erreurs et ses emportements. On ne gardera que la poésie et l'émotion que l'on ressent en écoutant ces vers : "Il n'est rien de plus beau qu'aimer l'autre bien plus qu'on s'aime soi".

Olivier Vadrot

"Damien Saez à corps et à cris" Romain Lejeune
Ed Braquage (160 pages)








   

  

jeudi 19 octobre 2017

L'aventure Starmania

L'aventure Starmania



        Bien sûr, "L'aventure Starmania", n'est ni une biographie et encore moins une autobiographie. Mais, tout de même, j'ai ressenti le besoin d'écrire sur cet ouvrage, car je ne vois en Michel Berger et Luc Plamondon que les deux géniteurs d'une même oeuvre. Aussi bien que les enfants naissent d'un père et d'une mère, cet opéra-rock fut conçu par un auteur et un compositeur. Chacun ne s'aventurant pas dans le domaine de l'autre.



         Autant le dire d'emblée, ce livre est une mine, un trésor pour ceux qui comme moi sont fans de Starmania. François Alquier, auteur de cette somme, a rencontré de très nombreuses personnes qui ont eu la chance et le bonheur de vivre au plus près, la création, puis l'évolution du spectacle. 

        "La génèse" représente sans conteste la partie la plus forte du livre. En recoupant les interviews actuelles avec les propos recueillis à la fin des années 70, nous nous trouvons plongés au coeur même de la création. Des séances de travail, où l'on découvre un Plamondon à la cool et peu dans l'urgence, face à un Berger avide de création et emporté par les mélodies qui lui sortaient du bout des doigts, jusqu'aux folles séances de studio, François Alquier ne nous épargne rien et on l'en remercie.

      Puis, les trois grandes versions scéniques sont passées en revue : 1979, avec le casting le plus fameux : Daniel Balavoine, France Gall, Diane Dufresne, Fabienne Thibeault, Nanette Workman ou Etienne Chicot. La reprise de 1988, mise en scène par les auteurs eux-mêmes, qui permettra l'explosion de Maurane et l'apparition au grand public de jeunes talents comme Renaud Hantson, Nathalie Lhermitte, Sabrina Lory ou Peter Lorne et enfin la dernière version en date, celle de 1993 qui restera à l'affiche une dizaine d'années partout dans le monde, mais sera la moins appréciée de France Gall...

     En parcourant ce livre, vous découvrirez de très nombreuses photos inédites, le témoignage surprenant d'Yves Bigot qui affirme que la première version n'a pas du tout marché commercialement parlant,  l'analyse musicale d'Anne Toujas-Marchand, professeur agrégée d'éducation musicale, ce qui renforce l'intérêt de l'ouvrage. 

  "L'aventure Starmania" sera sans conteste la référence pendant longtemps auprès des inconditionnels de l'oeuvre. 

    Espérons que 2018, l'année du quarantième anniversaire, permette enfin de voir à nouveau ce spectacle sur une scène. Nous sommes en manque de Starmania !

Olivier Vadrot

"L'aventure Starmania" François Alquier
Ed Hors collection (160 pages)





jeudi 11 mai 2017

La fille du Ribatejo 
autobiographie de Marie Myriam


Il y a longtemps que je n'ai plus acheté de livre d'artistes qui racontent leur vie. Pourtant, alors que rien a priori ne m'attire vers Marie Myriam, j'ai glissé son ouvrage dans mon panier. La raison en est très simple, j'ai habité sans le savoir, cinq années dans la rue qui l'a vue grandir, à quelques mètres du Ribatejo, le restaurant familial. Si son histoire s'était déroulé à Asnières, il y aurait eu peu de chance que ce livre finisse sur mon bureau.



Tout d'abord, disons-le, ce récit est touchant. En effet, tout au long des quelques deux cents pages, la chanteuse nous offre un portrait humain et désintéressé. Entre les lignes, nous la sentons bien plus proche de sa famille, de ses amis que des fastes du show business. Il est tout de même assez rare d'être à la fois artiste et gérante d'un restaurant ! D'ailleurs ce dernier métier lui prend semble-t-il beaucoup plus de temps et d'énergie que de monter sur scène pour y interpréter ses succès. C'est la fidélité et l'amour que Marie Myraim vouait à son père qui l'ont poussé à cumuler deux activités diamétralement opposées.

Son père, cet homme qu'elle vénérait tant, lui a prouvé tout au long de sa vie que la réussite est faite d'effort et d'abnégation, mais également de rire et de joie. Cet homme originaire du Portugal qui migra vers le Congo, y fit fortune, puis reparti de rien en arrivant à Paris, pour finalement bâtir une réussite toute personnelle et enfin avoir le bonheur de s'offrir une belle maison en bord de mer, dans pays natal.

Marie Myriam parle beaucoup de sa tribu, mari, soeur, enfants, neveux, amis... Pour ceux qui cherchent du croustillant, des révélations concernant le monde artistique, ils risquent d'être déçus car ce n'est pas le grand livre qui permettrait de faire la lumière sur des pratiques plus ou moins honnêtes. Non, hormis quelques anecdotes faites de petits rien, elle nous retrace quarante ans de carrière, avec des hauts et des bas.

La place réservée au Grand Prix de l'Eurovision 1977 est importante, bien entendu et semble tout droit sortie d'un conte de fée. Le producteur qui déjeune dans le restaurant des parents et qui entend la jolie voix de fille de famille qui répète au sous-sol. Il tombe sous le charme et en fait la gagnante que l'on connait en quelques mois seulement.

A ce jour, malgré tous les autres enregistrements d'albums réalisés, "L'oiseau et l'enfant" demeure le plus grand succès de Marie Myriam et restera ancré dans les mémoires encore de nombreuses années.

"La fille du Ribatejo" vous fera passer un bon moment entre tendresse et émotion, ombre et lumière, joie et tristesse. La vie quoi !

Olivier Vadrot



lundi 11 avril 2016

Spèrme


Autobiographie de Michel Polnareff


C'est ce qu'on appelle, en langage marketing, un achat compulsif. Samedi soir, je flâne au rayon livres, d'un supermarché quelconque et regarde les dernières parutions. Mes yeux se posent sur cette belle couverture noire, sur laquelle on découvre pour moitié, un Polnareff pensif, accoudé à une console, dans un studio d'enregistrement et sur l'autre partie, le titre « Spèrme », écrit en caractères rouges, sauf deux lettres blanches, le S et le M.

Je fus surpris par la locution utilisée, comme titre. Jamais, je n'ai vu d'accent grave, ni aigu d'ailleurs, sur ce mot. Une coquetterie d'auteur, sans doute, qui laisse entrevoir aux lecteurs, que le contenu de l'ouvrage allait être riche en révélations croustillantes. Qu'importe, je suis tombé dans ce piège commercial et ai mis le livre dans mon panier. Je me pressai de rentrer, afin de tout savoir sur cet artiste, ô combien important, dans le petit monde de la chanson française.



Une fois bien installé, j'ai soupesé plus le livre. Un doute m'habita d'un seul coup. Comment après cinquante ans de carrière, un chanteur peut-il condenser son autobiographie, en deux cents pages ? N'importe quel ouvrage traitant d'une aussi longue vie artistique mériterait au minimm un traitement sur le double. Mais ne vendons pas la peau de l'amiral (c'est comme cela que ses fans le surnomment), avant de l'avoir lu. Il n'a certainement conservé que le suc de sa vie et n'a pas encombré inutilement le lecteur de scories.

Las, rien de neuf sous le soleil. Il se répète beaucoup. Il est premier prix de conservatoire, en piano. Son père était un tyran. Il s'est pris de nombreuses dérouillées étant enfant. Il aime les femmes. Il aime les femmes et je crois qu'il aime les femmes. Le chanteur revient d'entrée de jeu, sur la sordide histoire vécue à la naissance de son fils, qui en réalité était d'un autre père, mais aujourd'hui jure-t-il, tout va bien dans sa petite famille. Nous comprenons très bien qu'il a une haute estime de lui-même et était sûr de devenir quelqu'un d'important quand personne ne croyait en lui. Qu'il a passé près de mille jours enfermés au Royal Monceau, à en devenir presque aveugle et a jeté son dévolu sur la vodka, avant de passer au Whisky, lors de ses seules sorties de sa chambre, en direction du bar. C'est un perfectionniste qui peut mixer plus de cent fois le même titre.  Nous raconte l'histoire de la photo de l'Olympia, les fesses à l'air. Revient sur son arrivée aux USA, sans un sou en poche, ruiné par un homme d'affaire véreux, mais a les moyens de vivre à Los Angeles (sic). « Lettre à France » fut composée dans un restaurant de New-York, un soir de déprime, la mélodie notée sur un coin de nappe en papier. Son bonheur de retrouver son public, en 2007, lors d'une tournée triomphale, avec en point d'orgue de ce retour, un grand concert pour le 14 juillet, devant plus d'un million de spectateurs.

Lorsque j'étais au collège, puis au lycée, il m'est arrivé de lire de petits ouvrages appelés « Profil d'une oeuvre », à défaut de me farcir tout un roman qui ne me plaisait pas. A la fin de ce « Sperme », j'eus la même sensation. Je suis capable de raconter Polnareff, dans les grandes lignes, sans rien en savoir. Cette autobiographie pourra satisfaire les novices, mais si vous avez déjà vu « Un jour, un destin », consacré au chanteur à lunette noire, alors, vous pouvez vous passer de ce livre. Vous n'y apprendrez rien.

Quant au titre, je n'y vois qu'une éjaculation littéraire précoce. Rien de plus.


Olivier Vadrot

lundi 21 mars 2016

La jeune fille et Gainsbourg

Constance Meyer a vécu avec un joli secret, pendant près d'un quart de siècle. Jeune adolescente de quinze ans, elle rencontra Serge Gainsbourg, gràce à une lettre glissée sous la porte du 5 bis, rue de Verneuil, en tomba éperdument amoureuse, au cours de leur premier dîner et partagea l'intimité du créateur de "Je t'aime moi non plus", de 1985 jusqu'à sa disparation, en mars 1991.

A l'opposé des biographies traditionnelles, qui nous rapportent des propos glanés ça et là, l'auteure nous fait pénétrer dans le secrêt du quotidien de l'artiste, dans ce qu'elle a vu, entendu, senti ou ressenti.


Ce livre ce lit, autant qu'il se regarde. Tel un scénario de cinéma, on suit Gainsbourg - jamais Gainsbarre -  au fil de sa vie, des soirées passées à la maison, quand il cuisine au beau milieu de la nuit ou lors de visites surprises au commissariat du quartier, venu avec force bouteilles de Champagne et jambon de pays. On assiste à l'écriture du scénario de "Charlotte for ever", dicté en une nuit, à une dactylo venue avec sa machine à écrire et installée dans la bibliothèque, au premier étage du petit hôtel particulier. 

Surtout, nous découvrons, pour ceux qui en doutaient encore, un Lucien Ginzburg terriblement humain, d'une rare gentillesse et extrêmement généreux, avec ceux qui croisaient sa route. Rares sont ceux qui ouvrent leur porte aux inconnus et file des billets de cinq-cent balles, aux mômes ayant attendus sous la pluie, afin qu'ils puissent rentrer chez eux en taxi, après avoir dit leur admiration au chanteur.

Constance Meyer a retrouvé l'âme de ses quinze ans pour écrire ce récit. A la fin du livre, quelques pages recopiées de son journal intime, nous plongent dans les battements de son coeur pour celui qui avait quarante ans de plus qu'elle, mais qui ne l'a jamais considérée comme une enfant. C'est beau, parce que c'est sain. L'amour consenti et partagé n'a pas d'âge.

Olivier Vadrot